Production • Rhizome
Auteur • Élise Turcotte
Acteur • Klervi Thienpont
Concepteur sonore • Mathieu Campagna
Treize opus de la série Phonèmes, s’inspirant de la tradition de la radiofiction, furent produits entre 2001 et 2006.
Un auteur, son texte, la place publique. Les spectacles de la série Phonèmes, tirant leur source de la grande tradition du récital littéraire, s’articulent autour de la présence de l’auteur sur scène. Il se tient debout, il assume sa création, la donne au public, mais sa voix n’est plus nue. D’autres voix, celles de comédiens, l’enveloppent, des images se déploient et c’est tout l’univers textuel de l’auteur qui se ramifie en de multiples façons de porter les émotions, l’imaginaire, la poésie : mise en scène sonore, performances électroacoustiques et installation vidéo.
Concrètement, Phonèmes est la rencontre scénique de la littérature récitée, du modelage sonore généré par l’électroacoustique et du court métrage. Se détachant du récital conventionnel, Phonèmes permet à un auteur de présenter lui-même son texte en misant sur le son et la vidéo de Rhizome pour l’appuyer. Les médiums technologiques – dont les interventions, découlant d’une lecture approfondie de l’œuvre, sont élaborées en studio – appuient le texte et créent une atmosphère propice à l’écoute.
Navires de guerre
Spectacle où l’intime touche à l’universel. L’expression du seul quotidien extraordinaire. Les courts moments, en bas-reliefs distorsionnés, accompagnés d’une clairvoyance de l’inédit. Les textes d’Élise Turcotte s’écoutent comme ils se lisent, à grandes gorgées suaves, à s’y perdre pour ne s’y retrouver qu’à-demi, privés d’une lucidité devant la durée. Baigné des ambiances sonores de Mathieu Campagna et Marc Doucet, portés par la vidéo d’Éric Proulx, les textes d’Élise Turcotte amènent le spectateur au plus près de ce mystère du quotidien que tous connaissent, même inconsciemment.
J’avais enregistré la peur dans ma voix pour qu’il comprenne bien ce qui était là entre nous. L’enfance noire. La passion. Ce qui n’a de vie qu’à travers sa propre destruction. Toi, tu regardais ma violence, une autre tache ultra-violette à travers la nuit. J’attendais des soucoupes volantes lumineuses pour venir me sortir de là. De l’orage. Un geste transparent qui me conduise à quelque chose de simple comme des arbres sur la rue, des voix balancées par le pas de la marche, un léger tremblement de la peau. Dites-le moi. Dites mon nom. Je m’appelle Élise, Élise sur la rue, sous les arbres avec une perle sur le lobe de l’oreille droite et le soleil sur mes bras. Dites-le, dites ce que vous savez de nous comme s’il s’agissait de parler de la pluie, d’un fruit, d’un livre d’images. La perle du lobe de l’oreille gauche, il l’avait emportée sans le savoir.
Phonèmes – Élise Turcotte d’après Navires de guerre, Écrits des Forges, 1984.